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9 - Languedoc, Baronnies et Cornas septembre 2015


Les vendanges 2015 s'annonçant plus précoces cette année, nous avons décidé d'avancer quelque peu les dates de notre voyage automnal de façon à ne pas gêner nos amis vignerons dans leur travail le plus délicat de l'année. 

A l'heure où j'écris ces lignes, les vendanges sont terminées partout et les premiers résultats commencent à se dessiner. De toute évidence, les conditions climatiques estivales étaient de nature à engendrer l'optimisme vu un état sanitaire assez exceptionnel un peu partout. Le petit bémol provenait de certaines zones touchées par un stress hydrique, et tous attendaient un peu de pluie et des nuits fraîches, de peur de voir le phénomène "2003" se reproduire. Les premières analyses de fin août-début septembre et les raisins croqués ça et là nous donnaient toutefois des renseignements précieux : les tanins étaient loin d'être aussi sévères qu'en 1995 ou 2005, et les raisins se tenaient bien mieux qu'en 2003. La météo ayant annoncé des pluies localisées parfois abondantes, les vendanges s'organisaient, chacun craignant l'orage dévastateur qui réduirait à néant une année d'efforts.....

Sans entrer dans les détails, trois tendances principales se dégagent des premières constatations d'après vendanges :

• Le degré alcoolique étant là, certains ont décidé de vendanger assez rapidement estimant qu'attendre n'était pas utile.

• D'autres ont préféré ne pas se précipiter, se disant que quelques pluies légères n'affecteraient en rien la qualité des baies vu l'état sanitaire impeccable sur les terroirs les plus tardifs.

• Certains enfin n'ont pas hésité à prolonger le cycle végétatif malgré des pluies quelques fois assez importantes, mais qui ont eu l'énorme avantage de faire baisser le degré alcoolique et d'équilibrer la matière et la complexification des arômes.

Il est évident qu'il n'y a pas, comme chaque millésime, de solution magique applicable à tous, mais l'année est plus que prometteuse, et il faudra attendre quelque mois pour vous donner des renseignements plus précis.

La première étape de notre périple nous amène à Aniane au Mas Laval où Joël Laval nous attend pour l’assemblage de l’Immiscible 4. Les caractéristiques de l’année 2014 (millésime séduisant, aux tannins souples) nous amènent à nous pencher sur la structure de l’assemblage. Amener de la consistance tout en conservant le très bel équilibre de la matière. La syrah sera donc majoritaire, complétée par le mourvèdre et le carignan. Le grenache et le cinsault complèteront la cuvée pour leur élégance, et nous avons ajouté une pointe de petit verdot pour donner une touche épicée à l’ensemble. La mise est prévue pour fin octobre et le vin sera disponible à partir de la mi-novembre.

Les « Pampres » (d’une étonnante suavité) et la « Grande Cuvée » (comme d’habitude sur la puissance) ont un air de ressemblance avec le millésime 2012 qui nous avait enchantés.

Joël nous emmènera ensuite dans une très jolie « guingette » nichée au cœur de la montagne (« L’Observatoire des Etoiles », ouvert uniquement en été) où nous terminerons cette première journée… Le lendemain, en remontant vers le Rhône Nord, nous avons prévu un arrêt dans les Coteaux des Baronnies. En effet, un ami en vacances dans la région nous avait ramené une bouteille d’un domaine tenu par un couple de jeunes œnologues. Un vin très bien fait, avec beaucoup de fraîcheur. Le domaine est situé à Mérindol-les-Oliviers, là où l’on allonge le bout du monde avec des planches….mais quel endroit splendide… Nous y avons dégusté sous les oliviers les millésimes 2013 et 2014 ainsi qu’un délicieux nectar d’abricots… Une dégustation plus approfondie se fera avec les bouteilles ramenées du domaine pour déterminer si ce vin de niche peut trouver sa place dans notre gamme.

La soirée est consacrée à la gastronomie de la région   . Nous avons réservé à notre QG de la région, le « Mangevins », à Tain-l’Hermitage. Installé maintenant depuis quelques années, le resto affiche complet tous les soirs...Indispensable donc de réserver si vous voulez vous délecter de la cuisine de Keiko et de la splendide carte de vins à prix raisonnables de Vincent. Bib gourmand au Michelin amplement mérité….

Le jour suivant, nous démarrons chez Emmanuelle et Johann Michel (qui seront présents à nos journées vigneronnes de novembre) par la dégustation du millésime 2014 qui termine son élevage. Belle réussite encore pour ce domaine tenu par deux autodidactes passionnés et travailleurs acharnés qui sont en train de replanter à tour de bras sur Cornas, Saint-Peray et Saint-Joseph…. On se rend compte à la dégustation que les vignes prennent de l’âge et que la vinification de Johann se fait chaque année plus précise. Les « Grains Noirs » (déjà en bouteilles) offrent un fruit remarquable et le vin se rapproche de plus en plus de la définition aromatique des Cornas. Ces même Cornas dégustés sur fûts présentent des différences notables, de barrique à barrique, de terroir à terroir, mais on se rend compte que le vin se fait plus « profond », qu’il gagne en rectitude sans perdre de sa souplesse et de son approche immédiate. Le style du millésime se rapproche du 2012, mais en plus complet, sur tous les plans…. La cuvée « Jana » commence à prendre son envol… Une approche plus réfléchie de la qualité des fûts n’y est certes pas étrangère, de même que le type de brûlage du bois.

Les 2013 sont des vins un peu plus austères qui auront besoin d’un peu plus de temps en bouteilles pour se livrer. Nous remontons le temps et constatons millésime après millésime que les vins se tiennent remarquablement au vieillissement. Et notamment un splendide 2010 en jéroboam que Johann a amené à la « Tonnelle » petite auberge sympa où nous cassons la croûte à midi.

A Cornas, Olivier et Pierre Clape ont vendangé les Saint-Peray et le pressurage est en cours lorsque nous arrivons. La traditionnelle descente en cave est précédée par la dégustation du Vin des Amis et du Côtes du Rhône 2014 qui viennent d’être mis en bouteilles. Le ton est donné, et la dégustation sur foudres des Cornas va nous le confirmer : la nouvelle va faire le tour du monde des amateurs . Enfin un millésime accessible pour ce domaine où les vins nouveaux sont d’habitude très réticents dans leur jeunesse…Si l’on retrouve les caractéristiques habituelles de structure, de puissance et de longueur, elles sont ici déclinées sur un mode plus délicat qui lui sied à ravir. Quelques parcelles qui d’habitude se retrouvent dans le grand vin prendront place cette année dans la cuvée Renaissance afin de préserver l’intégrité du Cornas. Et le Côtes du Rhône ainsi que le « Renaissance » pourront donc s’inviter à votre table dès leur mise en bouteilles, ce qui procurera à pas mal de monde un plaisir qu’ils ne pouvaient plus s’offrir depuis quelques années.

Le millésime 2013 qui va arriver sera lui très classique en qualité, mais hélas plus réduit en quantité vu la sélection drastique qui a été effectuée. Nouveauté cette année : le Saint-Peray 2014 va faire son apparition à notre carte.

Guillaume Gilles continue son ascension… Nous l’avions prévu, et c’est arrivé … Sa réputation s’est répandue comme une trainée de poudre, et comme malheureusement il n’a pas beaucoup de vin…. Il faut dire que les vins du domaine représentent une synthèse parfaite des deux styles qui prédominent à Cornas. A la fois traditionnel par sa façon de travailler à la vigne comme en cave, et novateur par sa recherche de l’élégance et de la texture soyeuse dans ses vins, Guillaume réunit tous les suffrages !

L’expérience aidant, on ressent à chaque dégustation une analyse toujours plus pertinente, la recherche du moindre détail ayant désormais son importance pour encore faire grandir la qualité des vins du domaine. Petit détail qui nous échappe encore : pourquoi les vins subissent-t-ils chez nous un phénomène temporaire de réduction alors que les mêmes vins dégustés chez lui restent stables ? Guillaume n’a fait qu’une demi-récolte en 2013, ce sera donc reporté sur notre allocation… Heureusement, 2014 est à la fois très réussi et abondant, excepté pour la « Combe de Chaillots » secteur qui a subi les intempéries de plein fouet. Le Cornas est une grande réussite, les terroirs qui le composent (« Les Grands Murs et les Terrasses ») formant une formidable alchimie.


                                                                                                                   @Pierre Ghysens, Octobre 2015